Prison Reform or Prison Abolition?
Thèmes centraux
- Hégémonie de l’institution carcérale dans l’imaginaire social moderne
- Naturalisation historique et culturelle de la prison
- Inertie réformiste face aux logiques d’enfermement
- Nécessité de re-politiser la question pénale par une perspective abolitionniste
- Prison comme produit d’une histoire racialisée et capitaliste de la punition
- Effacement idéologique de la violence structurelle de l’enfermement
Résumé et analyse
Ce chapitre introductif pose les bases de la critique radicale d’Angela Y. Davis contre l’institution carcérale. Elle montre que la prison, bien qu’omniprésente et en expansion, est largement soustraite au débat public, tant elle paraît « naturelle ». Cette naturalisation résulte d’une longue histoire de légitimation sociale, politique et culturelle, dissimulant ses racines racistes et capitalistes.
Davis rappelle que l’explosion de la population carcérale aux États-Unis depuis les années 1980 ne résulte pas d’une hausse de la criminalité, mais de politiques punitives liées à des transformations économiques et idéologiques. Le système carcéral joue un rôle de contrôle social, en particulier sur les populations racisées, en prolongeant des formes antérieures de domination comme l’esclavage et la ségrégation.
L’autrice met en cause les limites du réformisme, qui contribue souvent à renforcer le système en l’adaptant, plutôt qu’à le transformer. Elle propose une réorientation radicale vers l’abolitionnisme, conçu non comme un rejet de toute justice, mais comme l’invention de formes alternatives de gestion des conflits sociaux, centrées sur la transformation et la réparation.
La prison n’est pas inévitable : elle est le produit d’une histoire située. L’abolitionnisme, selon Davis, ne consiste pas à supprimer sans réfléchir, mais à imaginer d’autres mondes possibles, où la justice ne rime plus avec enfermement.
Concepts clés définis, expliqués et historicisés
Prison industrial complex
🔹 Définition
Ensemble des intérêts économiques, politiques et idéologiques qui soutiennent et renforcent l’expansion du système carcéral.
🔹 Contexte historique
Analogie au « military-industrial complex » : popularisé dans les années 1990, en lien avec les politiques néolibérales, la privatisation des prisons et les logiques racialisées de contrôle.
Abolitionnisme pénal
🔹 Définition
Perspective critique visant à démanteler le système pénal, plutôt qu’à le réformer.
🔹 Contexte historique
Apparu dans les années 1970 ; lié aux luttes féministes, noires et marxistes. Angela Davis l’enracine dans une histoire longue de résistance à l’ordre punitif racialisé.
Naturalisation (de la prison)
🔹 Définition
Processus qui rend la prison « évidente » ou « normale », en dissimulant ses origines historiques et ses alternatives.
🔹 Contexte historique
Résulte d’une longue légitimation idéologique de la prison comme solution « rationnelle » au crime, dès le XVIIIe siècle, renforcée par les idéologies libérales de l’ordre.