LA PETITE SOCIOTHÈQUE
Petites bouchées d'ouvrages militants à partager

Women’s Rights / Workers’ Rights / Anti-Imperialism: Challenging the Superexploitation of Black Working-Class Women

Thèmes centraux

  • Superexploitation des femmes noires de la classe ouvrière
  • Articulation des luttes féministes, prolétariennes et anticoloniales
  • Critique du capitalisme racial et du patriarcat
  • Relecture marxiste-féministe de la condition des femmes noires
  • Internationalisme et solidarités transnationales

Résumé et analyse

Ce chapitre explore la pensée stratégique de Claudia Jones à l’intersection des droits des femmes, des luttes ouvrières et de l’anti-impérialisme. Carole Boyce Davies met en lumière le concept central de superexploitation, utilisé par Jones pour désigner la condition spécifique des femmes noires : exploitées comme travailleuses, opprimées comme femmes, et marginalisées comme Noires.

Jones refuse de reléguer les femmes noires à la périphérie des mouvements sociaux : pour elle, elles sont au contraire au cœur des contradictions du capitalisme racial. Elle critique les syndicats dominés par des hommes blancs pour leur aveuglement face aux oppressions croisées, et dénonce un féminisme blanc indifférent aux réalités de race et de classe.

Sa lecture holistique articule revendications économiques (logement, santé, salaires, droits reproductifs) et critique systémique du capitalisme racial. Elle annonce ainsi les développements futurs de l’intersectionnalité et du féminisme matérialiste noir.

L’internationalisme structure toute sa pensée : Jones situe la condition des femmes noires dans une division mondiale du travail organisée par l’impérialisme. En reliant luttes locales et géopolitique globale, elle insère les travailleuses noires dans une résistance transnationale fondée sur les solidarités diasporiques.

Concepts clés définis, expliqués et historicisés

Superexploitation

🔹 Définition
Désigne une intensification de l’exploitation selon des lignes raciales et genrées. Les femmes noires subissent une triple oppression : elles sont sous-payées, cantonnées à des tâches subalternes, et exposées à des violences économiques et sociales spécifiques.

🔹 Contexte historique
Concept issu de la tradition marxiste, utilisé notamment pour décrire la surexploitation des travailleurs coloniaux. Claudia Jones l’adapte à la situation des femmes noires dans les métropoles capitalistes, annonçant les travaux d’Angela Davis ou Silvia Federici.

Féminisme marxiste noir

🔹 Définition
Analyse articulant classe, race et genre au sein d’un cadre marxiste. Jones affirme que les droits des femmes noires ne sont pas un supplément à la lutte des classes, mais une de ses composantes fondamentales.

🔹 Contexte historique
Ce courant se développe dans les années 1930–50 de manière dispersée, avant d’être systématisé dans les années 1970–80 par le Combahee River Collective. Jones en est une figure fondatrice.

Travailleuse domestique noire

🔹 Définition
Symbole de la dévalorisation du travail reproductif et racialement assigné. Les femmes noires sont surexploitées dans les espaces domestiques sans reconnaissance ni protection syndicale.

🔹 Contexte historique
Depuis l’abolition de l’esclavage, les femmes noires ont été confinées aux tâches domestiques dans les Amériques et en Europe. Jones politise cette figure en l’inscrivant dans une critique marxiste-féministe de la division du travail.

Internationalisme noir anticolonial

🔹 Définition
Stratégie et vision politique reliant les luttes des femmes noires à l’échelle mondiale, en lien avec les mouvements de libération nationale et les combats contre l’impérialisme.

🔹 Contexte historique
Dans les années 1940–50, les luttes anticoloniales nourrissent la pensée communiste noire. Jones, entre Trinidad, les États-Unis et le Royaume-Uni, actualise cette tradition panafricaine dans une perspective féministe et marxiste.