Reconsidering World History
Thèmes centraux
- Le projet impérial comme moteur structurant de l’histoire mondiale
- La production historique des inégalités globales
- Le lien entre capitalisme, race et pouvoir colonial
- La nécessité d’un cadre structurel pour penser les réparations
- La critique de la narration progressiste de l’histoire
Résumé et analyse
Dans ce chapitre, Olufemi O. Taiwo propose une relecture radicale de l’histoire mondiale en la centrant sur ce qu’il appelle le projet impérial. Il s’agit d’un effort structuré et cohérent, mené par les puissances européennes à partir du XVe siècle, visant à organiser le monde selon des intérêts politiques, économiques et raciaux bien précis. Loin d’être une série de conflits isolés ou de décisions ponctuelles, le colonialisme est présenté ici comme l’architecture matérielle et idéologique du monde moderne.
Táíwò déconstruit l’idée d’une histoire universelle orientée vers le progrès, en révélant les formes systémiques de domination — esclavage, extraction coloniale, dépossession territoriale — comme les véritables fondations de l’ordre mondial contemporain. Il plaide pour une vision structurelle de la justice : les réparations ne sauraient se limiter à des indemnisations ou à des gestes symboliques ; elles doivent viser la transformation des infrastructures sociales et politiques issues de ce passé impérial.
Ce chapitre repose sur une articulation forte entre histoire critique et philosophie politique : en retraçant les conditions matérielles qui ont donné naissance aux inégalités actuelles, Táíwò établit que les réparations doivent s’inscrire dans un horizon cosmopolitique et transnational, à la mesure de l’histoire qu’elles entendent corriger. Le chapitre critique également les approches moralistes ou individualisantes de la justice, en insistant sur la dimension structurelle de l’injustice.
Ce faisant, Táíwò engage une réorientation théorique importante : il ne s’agit plus simplement de réparer le passé, mais de comprendre comment ce passé continue de structurer le présent — et comment une politique des réparations doit s’attaquer à cette continuité.
Concepts clés définis, expliqués et historicisés
🔹 Définition
Ensemble organisé d’entreprises politiques, économiques et militaires menées par les puissances européennes en vue de construire un ordre mondial hiérarchisé, centré sur la domination, l’extraction et la racialisation.
🔹 Contexte historique
Formé dès le XVe siècle avec l’expansion portugaise et espagnole, consolidé par la traite transatlantique et l’impérialisme britannique et français. Fondé sur l’appropriation, l’exploitation et une légitimation raciale et religieuse.
🔹 Définition
Structure historique et matérielle organisant les relations internationales et les hiérarchies globales. Cette architecture est le produit direct du projet impérial.
🔹 Contexte historique
Elle prolonge les structures coloniales à travers des institutions contemporaines comme le FMI, la Banque mondiale ou l’OMC, reproduisant la dépendance et l’asymétrie postcoloniale.
🔹 Définition
Approche centrée sur la transformation des structures qui produisent l’injustice, et non sur les seuls torts individuels ou compensations symboliques.
🔹 Contexte historique
Développée par Iris Marion Young et Thomas Pogge, articulée aux traditions panafricaines, anticoloniales et aux critiques de l’impérialisme, cette justice vise la reconfiguration des institutions globales.