LA PETITE SOCIOTHÈQUE
Petites bouchées d'ouvrages militants à partager

The Future of White America

Thèmes centraux

  • Effets à long terme de l’identité blanche et de la white consciousness sur la politique américaine
  • Polarisation partisane croissante autour des lignes raciales
  • Démographie et mythe de la minorisation blanche
  • Rôle des élites politiques dans l’activation ou l’atténuation du clivage racial
  • Maintien de la hiérarchie raciale par réincorporation stratégique dans la whiteness
  • Limites de la lutte contre l’inégalité raciale fondée uniquement sur le changement d’attitudes

Résumé et analyse

Dans ce chapitre prospectif, Ashley Jardina interroge les implications durables de l’identité blanche dans une société américaine en mutation démographique rapide. Elle rappelle que dans certains États (Californie, Texas, Hawaï), les Blancs sont déjà numériquement minoritaires, et que cette perspective nationale nourrit chez une partie d’entre eux un sentiment d’alerte statutaire, renforçant une conscience raciale active.

Elle souligne la stabilité de cette identité : environ 30 à 40 % des Blancs y adhèrent durablement, indépendamment de leur classe sociale ou de leur lieu de résidence. Une frange développe même une conscience blanche plus intense, exprimant un ressentiment explicite et une volonté de défense politique du groupe.

Jardina insiste sur le fait que cette dynamique ne s’explique pas par l’ignorance du privilège blanc : nombre d’identifiants reconnaissent leurs avantages, mais ne souhaitent pas y renoncer. Cela met en évidence les limites des approches moralisatrices ou éducatives, qui postulent que la reconnaissance entraînerait un changement d’attitude.

Elle avertit également du rôle central que jouent les élites politiques, capables d’exploiter cette conscience raciale blanche de manière stratégique, sans discours explicitement raciste. Le cadrage de certains enjeux (immigration, sécurité, assistance sociale) comme des menaces au groupe blanc permet une mobilisation électorale puissante.

Enfin, Jardina déconstruit le mythe démographique de la minorisation blanche, qui suppose une dilution inévitable du pouvoir blanc. Elle montre que la whiteness peut se recomposer en incorporant certains groupes auparavant perçus comme non-blancs (Italiens, Irlandais, certains Latinos ou Asiatiques), maintenant ainsi la hiérarchie raciale.

Elle conclut que les luttes pour l’égalité devront désormais affronter deux formes de résistance : le racisme explicite et la défense euphémisée du statut racial dominant sous couvert d’intérêt collectif. L’idéologie blanche est appelée à jouer un rôle structurant dans le futur politique des États-Unis.

Concepts clés définis, expliqués et historicisés

Concepts clés définis, expliqués et historicisés

White consciousness (conscience blanche)

🔹 Définition
Forme politisée et mobilisée de l’identité blanche, marquée par la reconnaissance d’un destin collectif, la perception d’une menace sur le statut du groupe, et la volonté de le défendre activement dans l’espace politique.

🔹 Contexte historique
D’abord théorisée dans les études sur les minorités raciales, elle est ici appliquée au groupe dominant. Jardina montre que dans un contexte de diversification démographique, une conscience blanche équivalente émerge, moteur d’un vote conservateur et racialement structuré.

Mythe de la minorisation blanche

🔹 Définition
Narratif démographique selon lequel les Blancs deviendraient une minorité aux États-Unis, souvent projeté pour 2043. Ce récit alimente un sentiment de menace statutaire et légitime une mobilisation défensive.

🔹 Contexte historique
Jardina démontre que cette projection simplifie l’histoire de la whiteness, qui a toujours été recomposée par incorporation (Irlandais, Italiens, Juifs). Ce mythe renforce la polarisation raciale et la mobilisation identitaire blanche.

Réincorporation dans la whiteness

🔹 Définition
Processus par lequel des groupes initialement perçus comme non-blancs sont progressivement intégrés dans la définition sociale et politique de la blancheur, renforçant ainsi la hiérarchie raciale sans la déstabiliser.

🔹 Contexte historique
Observé historiquement avec les Européens du Sud et de l’Est, ce processus est aujourd’hui visible chez certains Latinos ou Asiatiques. Jardina le décrit comme un mécanisme d’adaptation de la blancheur, qui absorbe partiellement des groupes pour maintenir sa position dominante.