Idéologie, État et reproduction des rapports raciaux

Dans cette deuxième section, Stuart Hall poursuit son effort de dépassement du réductionnisme économique en intégrant la dimension idéologique à l’analyse des formations sociales racialisées. Il mobilise une relecture critique des travaux de Louis Althusser sur les appareils idéologiques d’État (AIE) pour penser la manière dont les sujets sont interpellés en tant que « racialisés » à travers des institutions comme l’école, la justice ou les médias.

Hall insiste sur la manière dont l’idéologie ne se réduit pas à un simple discours ou à une fausse conscience, mais constitue un ensemble de pratiques sociales qui produisent des subjectivités racialisées. La notion d’interpellation permet d’analyser comment les individus sont appelés à se percevoir et à être perçus comme appartenant à des catégories raciales spécifiques.

L’hégémonie, au sens gramscien, permet de penser la diversité et l’instabilité des représentations idéologiques du racisme : celles-ci ne sont pas imposées mécaniquement, mais produites à travers des compromis et des luttes. Le racisme peut se maintenir par des discours libéraux, humanistes ou multiculturels, dès lors qu’ils reconduisent les hiérarchies raciales.

L’idéologie est ainsi analysée comme une pratique incorporée, qui traverse les institutions et les gestes du quotidien, et qui organise la reconnaissance sociale des individus. Hall propose ici une théorie matérialiste de l’idéologie qui dépasse la simple opposition entre coercition et consentement.