The Third Declaration of War, 1967
Thèmes centraux
- Guerre des Six Jours comme moment de bascule impérial et colonial
- Occupation militaire de la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est
- Refus israélien de reconnaître les droits politiques des Palestiniens
- Résolution 242 comme effacement juridique du peuple palestinien
- Crise du panarabisme et émergence du nationalisme palestinien autonome
- Consolidation de l’occupation comme stratégie de domination territoriale
Résumé et analyse
Événements historiques marquants
- 5–10 juin 1967 — Palestine/Syrie/Égypte/Jordanie : Guerre des Six Jours et début de l’occupation militaire des territoires palestiniens.
- 1967 — Jérusalem : Annexion unilatérale de Jérusalem-Est par Israël.
- 22 novembre 1967 — ONU : Adoption de la résolution 242 par le Conseil de sécurité.
- 1969 — Palestine : Yasser Arafat prend la direction de l’OLP.
- 1970 — Jordanie : Expulsion de l’OLP après les combats du « Septembre noir ».
Ce chapitre identifie la guerre de 1967 comme la troisième « déclaration de guerre » contre les Palestiniens, au sens d’un basculement stratégique dans l’histoire du conflit. En six jours, Israël annexe la Cisjordanie, Gaza, le Golan et le Sinaï. Khalidi insiste sur le fait que cette victoire militaire installe une occupation durable, non pas comme mesure provisoire, mais comme un nouveau régime colonial visant à redéfinir les rapports de force à long terme.
L’auteur analyse en détail la résolution 242 adoptée à l’ONU : ce texte marque un effacement symbolique et juridique du peuple palestinien, qui n’y est même pas mentionné comme sujet politique. La résolution fonde l’ordre diplomatique post-1967, tout en évacuant la question des droits nationaux palestiniens. En parallèle, Israël consolide l’annexion de Jérusalem-Est, entame une politique de colonisation, et affirme une logique d’occupation sans fin, légitimée par la guerre et le droit international sélectif.
Khalidi montre également que 1967 signe l’échec du panarabisme comme projet unificateur. Après la défaite, les États arabes se recentrent sur leurs intérêts nationaux, tandis que les Palestiniens affirment un leadership propre autour de l’OLP. Cette autonomisation politique représente à la fois une opportunité et une fragilité : l’OLP doit affronter seule une puissance militaire soutenue par les États-Unis, tout en étant marginalisée sur le plan juridique.
L’occupation devient ainsi une forme permanente de guerre : Israël administre les territoires occupés par des moyens militaires, juridiques et bureaucratiques, tout en intégrant des segments du territoire à son espace souverain. Cette occupation n’est pas statique, mais dynamique, expansive, et constitue l’infrastructure d’une domination coloniale qui se renforce à chaque étape. Khalidi souligne que l’ordre international entérine ce rapport de force, tout en prétendant œuvrer à la paix.
Concepts clés définis, expliqués et historicisés
Occupation militaire
🔹 Définition
L’occupation militaire désigne le contrôle direct et coercitif d’un territoire par une armée étrangère, sans incorporation formelle à l’État occupant. Dans le texte, ce terme caractérise la domination israélienne sur la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est après 1967. Khalidi insiste sur le fait que cette occupation ne constitue pas une simple mesure temporaire liée à la guerre, mais un régime structuré de colonisation, d’administration et de dépossession prolongée, opérant dans le cadre d’une continuité coloniale.
🔹 Contexte historique
Le droit international humanitaire (notamment les Conventions de Genève) régit les occupations militaires depuis le début du XXe siècle, notamment après les deux guerres mondiales. Dans le cas israélo-palestinien, l’occupation est dénoncée comme illégale par de nombreuses résolutions de l’ONU, en raison de la durée, de l’annexion unilatérale de territoires (Jérusalem-Est) et de l’implantation de colonies. Le concept a été réinterprété dans les années 2000 par les sciences sociales critiques comme forme spécifique de gouvernement colonial différentiel.
Résolution 242
🔹 Définition
La résolution 242, adoptée par le Conseil de sécurité de l’ONU en novembre 1967, appelle au retrait des forces israéliennes des territoires occupés lors de la guerre des Six Jours et à la reconnaissance de la souveraineté de tous les États de la région. Dans le texte, elle est critiquée pour son ambiguïté linguistique volontaire (notamment en anglais) et son effacement explicite du peuple palestinien, remplacé par une référence générique aux « réfugiés ». Elle symbolise le traitement de la question palestinienne comme une crise périphérique, humanitaire ou sécuritaire, et non comme une question de droits nationaux.
🔹 Contexte historique
La résolution 242 devient la base diplomatique des négociations internationales sur le conflit israélo-palestinien pendant plusieurs décennies. Sa formulation ambiguë sur le « retrait des territoires » (the territories vs. territories) permet à Israël d’en limiter l’application. Elle est également symptomatique du basculement post-1945 dans les relations internationales, où les conflits coloniaux sont requalifiés en conflits interétatiques, au détriment des luttes de libération nationale. Elle est dénoncée par les Palestiniens comme un nouvel acte d’effacement juridique.
Panarabisme
🔹 Définition
Le panarabisme désigne une idéologie politique et culturelle prônant l’unité des peuples arabes dans un espace politique commun, au-delà des frontières coloniales. Dans le texte, il est analysé à la fois comme une source d’espoir pour les Palestiniens — notamment à travers le soutien rhétorique de Nasser — et comme une impasse politique : les régimes arabes mobilisent la cause palestinienne sans offrir de stratégie concrète, ni reconnaître la subjectivité politique palestinienne propre.
🔹 Contexte historique
Le panarabisme prend forme au début du XXe siècle et devient dominant dans les années 1950–1960 sous l’impulsion de leaders comme Gamal Abdel Nasser en Égypte. Il entre en crise après la défaite de 1967 face à Israël, révélant les limites des États postcoloniaux arabes. Dans le contexte palestinien, cette crise favorise l’émergence d’un nationalisme palestinien autonome incarné par l’OLP. Le déclin du panarabisme marque aussi la montée d’autres courants, comme l’islam politique ou les mouvements marxistes.