Caliban and the Witch
par Silvia Federici
Résumé du livre
Silvia Federici propose, dans Caliban and the Witch, une lecture féministe, matérialiste et historique de la naissance du capitalisme, en replaçant au cœur de ce processus la violence de genre et la réorganisation du travail reproductif. En rupture avec les récits classiques de l’accumulation primitive, elle montre que le capitalisme ne s’est pas constitué seulement par l’expropriation des terres ou la mise au travail salarié, mais aussi — et surtout — par la destruction des formes communautaires de vie et la discipline du corps, en particulier celui des femmes.
L’ouvrage commence par analyser la crise des structures féodales en Europe à la fin du Moyen Âge, marquée par des révoltes populaires et des luttes contre la servitude. Ces mouvements contestataires sont écrasés par une contre-offensive qui transforme en profondeur les formes de subjectivité : le capitalisme naissant impose une nouvelle rationalité, celle du travail abstrait, de la discipline individuelle, de l’obéissance aux normes morales et religieuses.
Federici démontre que cette répression des femmes européennes est le pendant direct de la violence coloniale exercée contre les peuples indigènes des Amériques. Le chapitre final articule la persécution des sorcières en Europe et la “christianisation” des femmes colonisées, toutes deux conçues comme des figures de résistance à détruire afin d’imposer une rationalité disciplinaire globale. La sexualisation des femmes indigènes, la destruction des savoirs médicaux locaux, et la féminisation symbolique de la colonie participent à une même logique d’appropriation de la reproduction au profit de l’ordre capitaliste.
L’originalité majeure du livre est d’avoir articulé les dimensions de genre, de race et de classe dans la constitution du capitalisme, en soulignant que la domination masculine et la violence contre les femmes ne sont pas des effets secondaires mais des conditions structurelles de l’économie capitaliste.